Les thèmes du congrès

Le choix des thèmes fait référence aux trois sphères d’interaction à la base du développement des personnes et société : la sphère du rapport à soi, celle du rapport à l’autre (humain et autre qu’humain) et celle du rapport à l’environnement, notre Oïkos. Ces thèmes ont été choisis dans une perspective de complémentarité avec ceux des congrès précédents et tiennent compte des résultats des diverses consultations menées par les coresponsables du congrès. L’ensemble des 12 thèmes retenus offre un large éventail de possibilités de participation. Nous souhaitons que tous les acteurs de l’éducation relative à l’environnement dans les différentes régions du monde se sentent interpellés pour y présenter leurs travaux et réflexions.

1. Les relations entre l’écologie et l’économie : l’enjeu de la viabilité

Les travaux de cette niche thématique invitent à explorer comment l’éducation relative à l’environnement peut contribuer à comprendre et à transformer les liens entre ces deux modes d’appréhension du monde, de notre Oïkos. Vivre dans cette maison commune nous amène à prélever, transformer, produire, échanger, consommer et finalement, à disposer de la matière même dont est constituée la Terre. Comment traiter des problématiques qui en résultent : changements climatiques, épuisement et concentration des ressources, exploitation, maldéveloppement, perte de biodiversité, pollutions, ressourcisme, risques d’aliénation entre nous et avec la Terre, etc.? Dans une perspective éducative, comment aborder l’analyse critique et la mise en œuvre des solutions proposées : agriculture soutenue par la communauté, altermondialisation, biorégionalisme, certification biologique, commerce équitable, décroissance, développement durable, écodéveloppement, économie sociale, écotourisme, écologie industrielle, économie écologique, fonds verts et éthiques, gestion du cycle de vie, etc.? Qu’en est-il de la recherche et de l’intervention en matière de formation environnementale au sein des entreprises?

2. Les questions d’équité socio-écologique

Sur Terre, au sein de cette maison partagée où nous devons apprendre à vivre ensemble, diverses sociétés et divers groupes sociaux ont des points de vue différents sur les réalités et les problématiques environnementales. De plus, certaines sociétés et certains groupes sociaux sont davantage affectés par les problèmes environnementaux. Les travaux de cette niche thématique traitent d’éducation relative aux enjeux environnementaux liés aux questions de genre, de race, de classe, de pauvreté, de justice, de violence et de guerre. Ces questions font appel à l’engagement critique des éducateurs à promouvoir la prise de conscience des divers problèmes d’équité socio-écologique et la mobilisation en faveur des transformations sociales (politiques, économiques, culturelles, etc.) qui s’imposent. De telles questions d’équité se posent également en ce qui concerne le rapport aux diverses formes de vie autres qu’humaine. Quelle contribution l’éducation relative à l’environnement peut-elle apporter à cet effet? Comment stimuler le dialogue entre les protagonistes des conflits d’écojustice, dont le dialogue Nord-Sud, à travers des projets d’action éducative?

3. La santé environnementale

La santé de la Terre et celle de ses habitants sont solidaires. Les travaux de cette niche portent sur les liens étroits entre la santé humaine et celle des écosystèmes. Non seulement s’agit-il de prévenir, de traiter et d’éradiquer les maladies et dysfonctions, mais aussi d’assurer les conditions de bien-être et d’équilibre. Aborder en ce sens les questions de la qualité de l’eau, de la sécurité et souveraineté alimentaires, des choix agro-alimentaire, des biotechnologies, des diverses formes de contamination, fait notamment appel à l’approche écosystémique. Cela fait appel aussi à la créativité pour inventer et pour mettre en place des projets alternatifs : l’agriculture urbaine, les initiatives du « slow food », les technologies de traitement de l’eau, etc. Comment relier entre elles l’éducation à la santé et à l’environnement pour la constitution du champ de l’éducation relative à la santé environnementale?

4. Les défis urbains

En ce début du XXIe siècle, plus de la moitié de la population humaine sur Terre vit dorénavant en ville. La vie urbaine comporte des avantages et soulève des défis spécifiques. Comment l’éducation peut-elle contribuer à relever les défis que posent par exemple l’urbanisation et les modes de vie que cela entraîne? Comment peut-elle contribuer à résoudre les problèmes de gestion des ressources (eau, énergie, déchets, etc.), d’aménagement, de transport, de sécurité, etc.? Comment l’éducation peut-elle être associée à la création de milieux sains et conviviaux, propices à la paix sociale et à la solidarité? Qu’en est-il du croisement entre nature et culture en ville? Qu’en est-il de l’environnement construit, comment sommes-nous « formés » par les matériaux, l’architecture et l’aménagement urbain? Comment faire face aux défis de la mixité et du métissage culturel, aux enjeux de l’identité et à ceux de l’appartenance communautaire au sein de la ville? Qu’en est-il des dimensions éducatives de projets et d’initiatives tels que « Grandir en ville », « Villes et villages en santé », « Écomunicipalités » et autres? Quels programmes, structures, dispositifs et services éducatifs les autorités locales peuvent-elles mettre en place? Finalement, comment l’éducation peut-elle aider mieux « vivre ensemble » en ville, sur Terre?

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5. L’écologisation des institutions d’enseignement supérieur

Au sein des institutions d’enseignement supérieur, les activités d’enseignement, d’apprentissage et de recherche de plus en plus spécialisées transforment notre conception du monde, notre rapport au monde et contribuent aussi à transformer notre Oïkos, notre maison de vie partagée. Inversement, les collèges et les universités ainsi que les activités qui y ont cours sont aussi influencés par les transformations du monde où ils s’insèrent. Qu’en est-il de l’écologisation de ces établissements? Les travaux de cette niche thématique traitent d’enjeux stratégiques et pédagogiques tels que les politiques institutionnelles, les choix curriculaires, la formation des enseignants, l’organisation apprenante, les pratiques de gestion et d’aménagement, etc. Les institutions d’enseignement supérieur forment des techniciens, des professionnels et des décideurs au sein de nos sociétés. On sollicite leur expertise et on s’attend à y trouver des modèles de pratiques socio-écologiques. Qu’en est-il de la prise en compte de l’environnement dans les programmes et la pédagogie de ces établissements? Qu’en est-il de leurs aménagements et de leurs modes de gestion? Les universités ou les instituts pédagogiques assument-ils leur rôle de former des enseignants capables et désireux de prendre en compte le rapport à l’environnement dans leur pratique éducative?

6. L’école au sein de sa communauté

Les 10 à 12 années d’école constituent une importante médiation entre le « vivre ensemble » de la maison familiale et le « vivre ensemble » au sein de la grande maison partagée, notre Oïkos, la Terre. Comment le rapport au monde est-il abordé durant les années de l’éducation préscolaire, primaire et secondaire? Comment favoriser et renforcer la création de liens entre l’école, la communauté et la société afin d’induire ou d’enrichir une dynamique d’éducation ancrée dans le milieu de vie? Quelle place les politiques publiques en éducation et les récentes réformes des curriculums accordent-elles au rapport à l’environnement ? Comment améliorer la pertinence des apprentissages scolaires et stimuler le développement d’une écopédagogie? Quelles sont les voies de développement professionnel continu en éducation relative à l’environnement  pour les enseignants et les autres éducateurs? Comment stimuler la pratique réflexive? Comment favoriser le « verdissement » des écoles : du projet éducatif à l’aménagement des lieux, en passant par les pratiques pédagogiques en classe et les expériences vécues sur le terrain? Finalement, par des services à la communauté ou par des projets d’action sociale ou écologique, comment les jeunes peuvent-ils s’engager de manière critique et authentique dans une démarche éducative afin de connaître, de comprendre, d’apprécier, de soigner et de transformer le monde auquel ils appartiennent?

7. L’éducation sociocommunautaire

Pour apprendre à vivre ensemble sur Terre, à l’échelle de la communauté, des collectivités locales ou à l’échelle de plus grands ensembles socio-écologiques comme les biorégions, les démarches éducatives se déploient dans une grande diversité de contextes et d’organisations, outre le milieu scolaire. Les questions socio-écologiques invitent dès lors à élaborer et à partager des savoirs et des savoir-faire associés à des environnements et des défis particuliers. L’éducation relative à l’environnement trouve ainsi de très nombreux créneaux de déploiement dans les milieux non formels, au sein des organisations communautaires et des autres lieux d’action sociale. Comment l’éducation relative à l’environnement peut-elle s’arrimer à des projets d’action sociale? Comment associer l’action et la réflexion dans les démarches collectives en prenant appui sur différentes propositions telles que l’apprentissage social, la communauté d’apprentissage, la communauté de pratique, l’organisation apprenante, etc.? Quels liens de réciprocité est-il possible d’établir entre l’éducation relative à l’environnement, l’éducation populaire, l’éducation communautaire et l’animation socioculturelle? Comment enrichir l’éducation des adultes d’une dimension environnementale? Qu’en est-il de l’éducation tout-au-long de la vie en matière d’environnement? Quel rôle les medias jouent-ils ou peuvent-ils jouer à cet effet?

8. L’interprétation du patrimoine

L’histoire de la Terre, celle de la vie sur Terre, incluant la vie humaine, inscrit chaque être et chaque société au sein d’un héritage considérable, complexe et hautement diversifié. Ce patrimoine est aussi une composante de l’environnement, du milieu de vie, de notre « maison partagée ». Comment ce legs est-il abordé en éducation relative à l’environnement? Un nombre grandissant d’initiatives en éducation relative à l’environnement ont lieu dans les musées d’histoire naturelle (comme les zoos, les aquariums, les jardins botaniques), dans les parcs, dans les écomusées et les autres institutions où se développe une riche expertise d’interprétation du patrimoine naturel, mais aussi du patrimoine construit, historique, artistique, etc. Qu’en est-il actuellement de la mission sociale de telles institutions? De quelle façon le rapport à l’environnement y est-il considéré? Comment harmoniser la gestion de telles institutions avec leur message éducatif concernant le rapport à l’environnement? Comment les initiatives éducatives de ces institutions peuvent-elles favoriser l’action locale en matière d’environnement ? Comment peuvent-elles favoriser les liens Nord-Sud et stimuler la solidarité? Les musées, les parcs et autres institutions d’interprétation peuvent-ils contribuer à une approche multi ou interdisciplinaire de l’environnement : sciences, art, histoire, etc. ? Comment évaluer l’action éducative dans un contexte d’interprétation? De quelles manières les apprentissages et les soins relatifs à cet héritage peuvent-ils infléchir l’action sociale et les politiques publiques relatives à notre « maison partagée »?

9. Le savoir et les pratiques autochtones

La Terre met au monde et soutient une très grande diversité biologique, étroitement liée à la diversité culturelle des peuples. La diversité des maillages entre nature et culture se traduit en une foule de savoirs, de pratiques et de réalisations pour habiter la Terre : agriculture, chasse, cueillette, pêche, cuisines, langues, mœurs, structures de parentés, cosmologies, habitations, modes de déplacements, etc. Ce thème invite à se pencher sur la dimension éco-culturelle du rapport à l’environnement. Il invite à explorer les relations entre les peuples, les territoires et les paysages, vers les « paysages intérieurs ». Les différentes cosmovisions inspirent différentes façons d’être-au-monde qui alimentent à leur tour les cosmologies. Comment l’éducation relative à l’environnement peut-elle aborder la diversité des modes de rapport au savoir, de narration et d’insertion dans le monde? Comment peut-elle prendre en compte les liens étroits entre l’héritage culturel, la culture, l’apprentissage, le savoir et l’agir? Comment aborder la dimension politique de la légitimation du savoir et des enjeux de marginalisation en ce sens?

10. L’éthique, la philosophie environnementale et les visions du monde

Au quotidien, vivre sur Terre nous engage dans une diversité de relations qui font appel à des choix éthiques plus ou moins réfléchis et délibérés. Notre manière de vivre sur Terre est toujours informée par une philosophie de l’environnement et par une certaine vision du monde que nous avons apprises, qui nous ont été transmises, que nous reconstruisons et qui sont au cœur de nos pratiques éducatives de manières plus ou moins explicites. Les travaux de cette niche thématique portent sur les liens entre l’éducation relative à l’environnement et l’éthique, la philosophie environnementale et les visions du monde. Dans une perspective écopédagogique, comment aborder les différents courants philosophiques et positionnements éthiques (du champ de l’écosophie) comme ceux proposés par la Charte de la Terre, l’écoféminisme, l’écologie profonde, l’écologie sociale, l’éthique de la sollicitude, l’éthique du proche, la justice sociale, la théorie ou l’hypothèse Gaia, et autres? Qu’en est-il des dimensions spirituelles et religieuses du rapport à l’environnement? Quelles avenues pédagogiques devrait-on privilégier, explorer : approches expérientielle, participative, systémique, etc.? Quels liens y a-t-il entre éthique et praxis?

11. L’art : imaginaire, créativité et signification

Pour les êtres humains, vivre sur Terre donne lieu à des productions chargées de sens et d’esthétique au-delà des seules questions utilitaires : arts premiers, art aborigène, arts traditionnels, beaux-arts, arts et métiers, artisanat, art moderne, art populaire, art contemporain, etc. L’art est une forme de rapport au monde, souvent avec la matière de la Terre, comme il est aussi une forme d’expression du rapport au monde. L’éducation relative à l’environnement invite à aborder la dimension esthétique du rapport à nos milieux de vie, de même que la dimension symbolique qui s’expriment à travers divers modes de production artistique : arts graphiques, cinéma, danse, installations, littérature, musique, théâtre, etc. Comment stimuler le développement d’une sensibilité environnementale et le déploiement du potentiel créatif des personnes à travers une démarche artistique? Comment intégrer l’apprentissage des arts et l’expression artistique en éducation relative à l’environnement? Comment les artistes, en tant que communicateurs, peuvent-ils contribuer à recadrer le rapport au monde, à proposer de nouvelles expériences du réel et à générer de nouvelles significations? L’art peut-il être associé à des démarches participatives? Peut-il être une forme d’activisme?

12. L’identité écologique

Partout sur Terre, la constitution de l’identité personnelle et culturelle comporte une composante écologique plus ou moins refoulée, explicitée ou valorisée. Les identités sont construites et évoluent, tout comme la vie elle-même, dans un réseau de relations avec le monde où nous vivons. L’expérience de la nature, des êtres et des choses est ainsi au fondement de notre identité écologique, c’est-à-dire de la perception de soi et de notre société dans le monde et de nos modes d’interactions avec l’environnement. Qu’en est-il du processus d’écoformation chez l’enfant, l’adolescent, l’adulte? Quelles expériences du monde l’éducation relative à l’environnement peut-elle favoriser afin de contribuer à la réflexion sur le processus identitaire et à la construction ou reconstruction de l’identité écologique, individuelle et collective? L’histoire de vie, le récit de vie, l’autobiographie environnementale et l’histoire environnementale apparaissent comme des voies fécondes pour travailler sur les questions d’identité écologique en éducation. Comment les mettre en œuvre? Quels liens y a-t-il entre l’identité et l’agir environnemental? Comment l’action éducative sur la question identitaire du rapport au monde, dans un contexte de mouvances et de migrations, peut-elle induire des conduites écologiquement et socialement responsables?